© photo Chloé Vollmer-Lo & Julie Dachez

Interview de Julie Dachez

© photo Chloé Vollmer-Lo & Julie Dachez

Evénements

© 2025 CRA LIMOUSIN. | Tous droits réservés.

© photo Chloé Vollmer-Lo & Julie Dachez | Tous droits réservés.

Le programme pour la journée mondiale de l’autisme sera marqué cette année par l’intervention de Julie Dachez lors du colloque du 2 avril à la Faculté de Lettres et Sciences Humaines de Limoges, Amphithéâtre Vareille.

Pour participer à cet événement gratuit, il est indispensable de s’inscrire  :
https://my.weezevent.com/conference-journee-mondiale-de-lautisme

Julie Dachez, Docteure en psychologie sociale, conférencière et militante française pour les droits des personnes TSA, s’adressera aux personnes autistes (ados, jeunes adultes, adultes) et à leur entourage. L’intitulé de son intervention “Apprendre à se Comprendre” explore des thématiques essentielles à l’épanouissement et à l’inclusion de tous.

Pour mieux cerner son sujet, le CRA Limousin a recueilli sa parole. Nous la remercions très chaleureusement pour sa disponibilité et pour le temps qu’elle a bien voulu nous accorder.

Bonjour Julie, pouvez-vous nous parler de votre parcours et de ce qui vous a motivé à conduire vos travaux et vos recherches ?

Après avoir travaillé un peu dans le domaine privé, sans que cela soit très épanouissant, j’ai fait une reprise d’études en psychologie. Parallèlement à cette reprise, le diagnostic d’autisme m’est tombé dessus (sic). J’avais 27 ans.

Recevoir ce diagnostic tardif a été comme un tremblement de terre dans ma vie. J’ai compris que mon comportement était en fait complètement normal, vu que j’étais autiste. Je n’étais pas une non autiste défaillante, j’étais juste différente.

Cette reprise d’études et ce diagnostic m’ont donné envie de faire une thèse. Je me suis intéressée au volet de la recherche en lien avec l’autisme.
Mon idée alors n’était pas d’étudier le TSA d’un point de vue clinique, c’est à dire d’en étudier les symptômes ou les méthodes d’accompagnement. Je me suis plus concentrée sur le point de vue de la psychologie sociale.

Je trouvais cela plus intéressant, car à l’époque ce qui me posait le plus de problèmes dans ma vie ce n’était pas tant le fait d’être autiste, mais plus d’être confrontée à l’incompréhension des personnes, de sentir de nombreux préjugés y compris après mon diagnostic.

Devant le peu de recherche qu’il y avait en psychologie sociale, je me suis dit qu’il y avait tout à faire et que le sujet méritait d’être creusé, contrairement à ce que l’on me disait. De voir l’autisme à travers un prisme social, c’était relativement nouveau lorsque j’ai débuté mon travail de thèse en 2013.

 

Il s’agit finalement d’une période assez courte, qui questionne le peu de travaux réalisés sur l’autisme à travers des disciplines plus sociales ?

Oui, mais pourquoi ? Parce que depuis le début, les recherches ont été menées par des personnes qui n’étaient pas autistes. Ces chercheurs ont donc eu leurs propres biais, et ont envisagé l’autisme en privilégiant une approche psychiatrique et une vision déficitaire. Ce que l’on sait donc aujourd’hui au sujet de l’autisme (ou ce que l’on pense savoir) s’est construit via ce prisme, qui n’est pas anodin, et que malheureusement peu de personnes ont questionné. Plus récemment, des chercheurs.euses autistes proposent une autre façon d’étudier l’autisme. Leurs travaux sont extrêmement précieux mais malheureusement peu connus.
Lorsque j’ai débuté mes travaux, il y a environ 10 ans, je ne me suis pas cachée d’être une femme autiste, ce qui n’a pas été sans conséquences. Certains membres de mon jury de thèse par exemple ont  remis en question mon manque d’objectivité, puisque j’étais une personne concernée. Mais tout le monde a des biais. Ce que je veux dire, c’est que personne ne peut avoir de position complétement neutre. Tous les chercheurs et chercheuses en sciences humaines et sociales font partie de la société qu’ils étudient, et sont donc inévitablement influencés par les biais et les enjeux de pouvoir qui la traversent. Il est nécessaire d’en avoir conscience afin de viser une objectivation des recherches. Et cela ne s’applique pas uniquement aux chercheurs et chercheuses autistes, mais à tous et toutes.

Mais c’est quelque chose qui demeure compliqué à faire entendre.

J’ai ensuite travaillé à l’INSEI : Institut national supérieur formation et recherche – handicap et enseignements adaptés (ex INSHEA) en tant qu’enseignante-chercheuse.

Actuellement, je suis en disponibilité pour me consacrer aux conférences, à des travaux d’écriture et de vulgarisation scientifique.

 

C’est donc dans ce cadre que nous aurons le plaisir de vous accueillir le 2 avril. Pouvez-vous nous expliquer ce choix actuel de privilégier ce type de travaux et d’interventions auprès d’un public plus large ?

Même si j’ai bénéficié de certains aménagements au sein de l’INSEI, j’ai trouvé très dur de faire un travail de qualité, notamment au niveau de la recherche.
En tant qu’enseignante chercheuse, je devais mener de très nombreuses démarches en lien avec ces deux activités. L’ensemble était titanesque.
J’ai donc fini complétement burnoutée. Ce qui m’a amené à faire un pas de côté.

Mon choix s’explique aussi par le fait que je pense être plus douée dans la communication scientifique, que dans la production de la recherche. Je crois que c’est ce qui me plait le plus. Cette idée de transmettre a plus de sens pour moi.

 

En quoi votre approche basée en partie sur les mécanismes sociaux éclaire-t-elle la question de l’autisme ?

Après ma thèse, je me suis ouverte à une approche interdisciplinaire, qui permet d’étudier un sujet en mobilisant plusieurs disciplines. Cela permet d’éviter une réduction du sujet à une seule grille de lecture. Par exemple, la psychologie clinique peut parfois se focaliser sur le “dysfonctionnement” et la pathologie, tandis que la sociologie met l’accent sur les structures sociales et les rapports de pouvoir. En combinant plusieurs approches, on obtient une analyse plus équilibrée.
Ces recherches viennent aussi déconstruire cette vision déficitaire de l’autisme.

Les travaux des chercheurs.euses autistes permettent de prendre conscience de l’impact que le validisme a eu sur la production de savoir sur l’autisme, et offrent un pas de côté. Leur porte d’entrée à eux n’est pas celle du déficit. Ils adoptent un point de vue plus macro pour aller interroger la façon dont la société, les injustices et discriminations impactent les personnes autistes (leur santé mentale, entre autres) et la façon dont elles sont perçues.

Je trouve que ce point de vue est extrêmement intéressant et que finalement il n’est pas beaucoup relayé et entendu.

 

Vous avez à cœur de redonner la parole aux personnes TSA. Quels sont vos attendus à travers cette démarche ?

Pour ma dernière recherche, notre équipe composée de différents chercheurs (en sociologie, sciences de l’éducation…) a interviewé des personnes autistes pour analyser leurs expériences dans l’emploi accompagné en France. Nous avons mis en place une méthodologie dite participative. C’est à dire que nous avons fait participer des personnes concernées d’A à Z, de l’élaboration du projet de recherche, jusqu’à la publication de l’article scientifique. Par exemple, la grille d’entretien qui a été réalisée a été construite avec des personnes autistes, et certains entretiens tout comme la recherche documentaire ont été réalisés par une assistante de recherche autiste, Sylvie Seksek, que j’ai fait monter en compétence sur certains aspects du projet.

C’est très important pour moi de travailler avec des personnes autistes et de les rémunérer pour leurs savoirs. Cette reconnaissance de leurs expertises devrait être la base. Rien ne devrait se faire sur nous sans nous.
Les recherches sont d’autant plus riches lorsqu’elles font réellement collaborer les personnes autistes. Malheureusement, c’est extrêmement rare. La plupart des recherches dites participatives demandent juste à une personne autiste son avis à un moment donné. C’est tout. Ce n’est pas ça la méthodologie participative.

Même si cette méthodologie est difficile à mettre en œuvre j’y suis extrêmement attachée. J’y accorde plus d’importance que la discipline elle-même pour mener mes recherches.
Je pense que c’est probablement mon dernier article scientifique car je ne compte pas mener de nouvelle recherche de si tôt, et je suis contente de finir là-dessus.

 

Cette volonté d’associer les personnes autistes dans vos travaux, d’être au plus près de leurs vécus et de restituer leurs paroles, c’est une conviction qui semble profondément ancrée chez vous ?

Oui c’est clair et puis je crois que c’est presque un acte militant.
Dans mon livre “Dans ta bulle “, j’avais repris une citation de Pierre Bourdieu qui disait, je crois, :
Les dominés ne parlent, pas ils sont parlés“.
Même si les choses évoluent ce sont très souvent des psychiatres ou des chercheurs qui viennent parler de ce qu’est l’autisme.

Pourtant, ce sont les gens qui le vivent au quotidien qui connaissent le mieux le sujet. Je trouve absurde de produire de la recherche sur des personnes autistes sans réellement les impliquer, de les réduire à des objets de recherche alors qu’elles devraient être sujets et co-créatrices des projets.

Le second point dans mes démarches concerne la recherche dite qualitative. Ce qui me plaît avec cette méthode, c’est que l’on va aller interroger les personnes et construire du savoir à partir de leurs propos. La difficulté, c’est qu’en psychologie aujourd’hui, on valorise énormément les recherches quantitatives (statistiques…).
Je crois que la psychologie a un complexe d’infériorité par rapport aux sciences dites dures, et que le quantitatif est très valorisé car témoigne (soi-disant) du sérieux des recherches. Cela se fait parfois au détriment du qualitatif, qui est moins considéré. C’est dommage, car cette approche permet d’obtenir des données riches et nuancées fondées sur l’expérience des principaux intéressés.
C’est aussi ce que je me suis attachée à mettre en avant dans mon dernier ouvrage “L’autisme autrement“ dans lequel je cite de nombreuses recherches qualitatives.
Les paroles des personnes autistes sont au cœur du bouquin.

 

Pourtant cette méthode peut être limitée face à l’hétérogénéité des profils dans le TSA comme par exemple avec les personnes non oralisantes ?

Mes recherches sont en effet spécialisées dans l’autisme sans trouble du développement intellectuel et concernent des publics oralisants. Dans le cadre de ma dernière recherche, on avait eu l’intention initialement d’interviewer des personnes autistes avec un trouble du développement intellectuel et / ou non oralisantes, et on avait commencé à réfléchir à la façon d’adapter nos outils, mais il s’est avéré que les personnes autistes qui bénéficiaient de l’emploi accompagné n’avaient pas du tout ce profil-là (ce qui laisse d’ailleurs sous-entendre un filtrage par la MDPH qui n’orienterait que les autistes oralisants et sans déficience intellectuelle vers l’emploi accompagné).

 Néanmoins les recherches avec un axe anti-validiste parlent pour tous, y compris pour les non oralisants. Elles se rejoignent autour de sujets et de besoins communs : plus d’autonomie et d’inclusion, mieux lutter contre les préjugés et les discriminations, une meilleure adaptation des environnements, l’importance de la neurodiversité, une meilleure acceptation d’un fonctionnement qui s’écarte de la norme…

Je rejoins le modèle social du handicap selon lequel le handicap est situationnel, contextuel. Et ça, ça vaut pour tous et toutes.

 

Cette notion d’environnement et d’autres comme la santé mentale ou le camouflage seront développées lors de votre intervention le 2 avril. Quels liens faites-vous entre elles ?

Le camouflage, le fait de masquer, est souvent corrélé avec une santé mentale dégradée. Il faut donc s’interroger sur le pourquoi de ce camouflage. Selon certains chercheurs.euses, les personnes autistes camouflent en réponse au stigma social, pour se préserver de la violence qui pourrait s’abattre sur elles si elles stimmaient en public, par exemple. Or, le prix à payer est lourd pour les personnes autistes, puisque comme nous l’avons dit à l’instant, le camouflage est associé à une santé mentale dégradée.

Il y a par ailleurs des travaux très intéressants sur le lien entre stress de minorité et santé mentale des personnes autistes, que l’on doit à Monique Botha. Quand on appartient à une minorité, on subit des facteurs de stress spécifiques à cette minorité (insultes, violences physiques, etc.) qui peuvent contribuer à expliquer les disparités entre la santé mentale et physique de ces personnes, et les autres.

Mettre en place des environnements inclusifs et respectueux du mode de fonctionnement des personnes est indispensable pour qu’elles puissent avoir certains espaces qui leur permettent de ne pas camoufler, ou moins que d’habitude. Qui plus est, les aménagements permettent d’étudier et de travailler dans de bonnes conditions, c’est un facteur de protection vis-à-vis du burn-out autistique notamment.

 

Merci Julie pour vos réponses et nous vous donnons rendez-vous le 2 avril.


L’ensemble de ces réflexions seront traitées et approfondies lors de la venue de Julie Dachez.
Retrouvez le programme complet du colloque sur : https://www.cralimousin.com/journee-mondiale-de-lautisme-2025/#conference

 

Accédez également au dossier documentaire réalisé par le CRA Limousin qui recense une partie de ces publications.
Certaines ressources sont consultables directement sur le web. D’autres peuvent être empruntées gratuitement auprès du CRA Limousin.

Interview et dossier réalisés par Nicolas Roumiguières.
Documentaliste du CRA Limousin.


Programme de la journée mondiale de l'autisme 2025

Evénements

Retrouvez sur notre page dédiée toutes les informations en lien avec la journée mondiale de l’autisme qui aura lieu le 2 avril 2025.

 

Projets de classe

Pour en savoir plus sur les projets de classes et  les trois appels à projets à destination de l’ensemble des établissements scolaires du territoire Limousin, en partenariat avec l’Académie de Limoges, cliquez ici.

 

Forums

Pour connaître les lieux des différents forums du 2 avril au matin sur la Creuse, la Corrèze et la Haute-Vienne, cliquez ici.

Ces forums, ouverts à tous, donnent de l’information, expliquent, déconstruisent les idées reçues et ouvrent des perspectives inclusives.

 

© photo Chloé Vollmer-Lo & Julie Dachez
© photo Chloé Vollmer-Lo & Julie Dachez
Conférence

CONFÉRENCE “AUTISME ET APPRENTISSAGES”
Faculté de Lettres et Sciences Humaines Amphithéâtre Vareille de 13h30 à 17h00
Entrée gratuite, sur inscription https://my.weezevent.com/conference-journee-mondiale-de-lautisme

Pour connaître le contenu de ce forum et les différents intervenants, cliquez ici.

 

Cinéma

« En tongs au pied de l’Himalaya »

Jeudi 3 avril 2025 cinéma Grand Ecran Ester à 20h00 séance à 7€
En présence de Marie-Odile Weiss co-scénariste. Toutes les informations sont accessibles en cliquant ici.

 

Les Foulées du Populaire

Venez défendre les couleurs de l’autisme en participant à cette course, sur Limoges, le dimanche 6 avril 2025  et intégrer l’équipe « Les TS’ATHLETES ».

Cliquez ici pour en savoir plus.

 

Manifestations complémentaires

Retrouvez les actions complémentaires menées par les partenaires du CRA Limousin dans le cadre de la journée mondiale (liste non exhaustive).
Toutes les initiatives recensées sont présentes en cliquant ici.


Temps de rencontres post-diagnostic 1er trimestre 2025

Evénements

Le CRA Limousin met en place à compter du 1er trimestre 2025 des temps de rencontre post-diagnostic :

 

  1. Vous venez de recevoir un diagnostic pour vous ou votre enfant, le Dr LEMONNIER, Directeur médical, propose des temps d’échanges :
  • Le samedi 11 janvier 2025
  • Le samedi 08 février 2025
  • Le samedi 8 mars 2025

Sans inscription, au CRA, de 10h00 à 12h00. Renseignements : 05 19 76 17 25.

2. Nos coordinatrices de parcours vous proposent un atelier :
«  Comment et pourquoi créer un emploi du temps ? »

  • Le 27 janvier 2025 de 9h30 à 11h30 (pour les parents d’enfants diagnostiqués entre 0 et 12 ans)
  • Le 18 février 2025 de 9h30 à 11h30 (pour les parents d’enfants diagnostiqués de 12 à 18 ans)
  • Le 25 mars 2025 de 9h30 à 11h30 ( pour les adultes diagnostiqués)

 

Sur inscription obligatoire, groupe de 8 personnes :  formation.cralimousin@chu-limoges.fr


Présentation de la future Maison de l'Autisme et des TND du Limousin

Evénements


Le mois de novembre 2024 a été marqué par le premier anniversaire de la stratégie nationale pour les troubles du neurodéveloppement 2023-2027 : autisme, troubles dys, trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), trouble du développement intellectuel (TDI).

Pour apporter des réponses à ces grandes orientations sur son territoire, le CRA Limousin, qui dépend du CHU de Limoges depuis 2018, lancera en 2025 un chantier exceptionnel par son ampleur et son ambition.
Il s’agit en effet de construire la Maison de l’autisme et des TND du Limousin, laquelle sera installée dans un bâtiment sis rue Mirabeau à Limoges, au terme de 10 mois de travaux de restructuration.

Comment ce projet a -t-il pris forme ? Quelles en ont été les étapes ? Avec quels acteurs et pour quels publics ?
Des questions auxquelles vont répondre les organismes et personnes concernés.

Un appel à mécénat est ouvert pour la réalisation de ce projet unique en France : cliquez ici


M. Jean-Christophe ROUSSEAU

Directeur Général Adjoint du CHU de Limoges

Pouvez-vous nous expliquer l’historique et les motivations du CHU à investir dans le projet d’une Maison de l’autisme et des TND en Limousin ?

Depuis 2018, le CHU de Limoges s’est engagé à accompagner le CRA Limousin dans ses missions et sur son territoire d’intervention.
Rapidement le CHU a souhaité apporter des réponses satisfaisantes, en terme de moyens pour assurer ce portage, notamment en matière de locaux et d’environnement.
Avec nos partenaires, nous avons très tôt engagé une réflexion pour trouver une solution adaptée qui convienne à tout le monde, usagers et professionnels, et qui fédère l’écosystème, l’ensemble ou le plus grand nombre de partenaires locaux de la filière.

L’idée de regrouper un maximum d’acteurs en un même lieu a alors été retenue.
Cette réflexion s’est aussi faite avec en arrière-plan la création d’une maison de l’autisme nationale à Aubervilliers. Même si les projets ne sont pas les mêmes, le vocable « maison » pour son côté fédérateur et accueillant est resté.

Concernant le choix du bâtiment, un groupe d’acteurs partis prenants du projet s’est constitué dès 2019. Chacun a pu exprimer ses besoins, notamment en terme de surfaces, pour définir un cahier des charges. Le choix s’est alors porté sur un bâtiment situé 22 rue Mirabeau à Limoges.

© ASB Architecte
Parvis d’entrée © ASB Architecte

Ces locaux présentent de nombreux avantages : une présence centrale dans Limoges et une bonne desserte. La superficie offre également des possibilités de développement et d’aménagement. Nous allons par exemple agrandir le parking existant pour accueillir les usagers et les bénéficiaires de tous les services présents.

L’acquisition du bien s’est faite en 2022.
Les travaux vont débuter avec un peu de retard à cause de la sortie de la crise sanitaire, de la hausse des coûts de construction avec le changement de certaines normes relatives à la performance énergétique.
Nous avons donc été obligés de revoir notre plan de financement qui, aujourd’hui, s’élève à 3.5 millions d’euros.

Quels sont les financeurs ?

Il y a un apport conséquent du CHU en lien notamment avec des crédits alloués par l’Agence Régionale de Santé de la Nouvelle-Aquitaine.
Nous avons aussi sollicité d’autres organismes et associations pour compléter ce budget.

Notre principal donateur est la Fondation des Hôpitaux.

Nous avons aussi été aidés à ce jour par l’Europe et les collectivités locales : le Conseil Départemental de la Haute-Vienne et la Ville de Limoges.

Nous souhaitons élargir notre financement et l’ouvrons à d’autres partenaires qui veulent soutenir ce projet avec la création d’un appel à mécénat (disponible ici).

 

Quelles vont être les missions de cette Maison de l’autisme et des TND et quel rôle va-t-elle jouer sur notre territoire ?

La Maison de l’autisme et des TND proposera différentes activités à la faveur des nombreuses structures qui vont la composer.

Nous voulons créer une synergie pour les professionnels et les usagers en mutualisant l’ensemble des ressources qui seront regroupées dans ce même lieu.

La Maison de l’autisme en nationale n’est pas comparable. Nous n’avons pas de circulaire ou de cahiers des charges sur lequel nous appuyer. C’est ce qui en fait son originalité et en même temps sa force.
Nous allons à présent entamer une phase de concertation avec nos partenaires pour définir des règles de fonctionnement communes et les responsabilités de chacun, sur le modèle d’un règlement de copropriété.

La réalité de cette maison sera ce qu’en feront ses occupants et la manière dont ils feront vivre ce lieu, mais il y a tout lieu d’être vraiment enthousiaste à son propos.

 

Quelles attentions seront portées pour prendre en compte les spécificités et particularités du public accueilli ?
Maison de l’Autisme d’Aubervilliers © Photo : ASB Architectures; Luca Nicolao

Au cours de l’année 2024, le CHU a sélectionné le cabinet « ASB Architectures » pour être le maître d’œuvre du projet. Ce cabinet d’architecte a une forte expérience dans le secteur médico-social. Il a déjà piloté de nombreux travaux comme la construction de structures d’accueil ou encore celle de la maison de l’autisme à Aubervilliers.

Nous échangeons très régulièrement avec ASB et les partenaires à travers de nombreux points d’étapes (visites sur site, visio conférences).

Pour conclure pouvez-vous nous dire quelles vont être les prochaines étapes avant l’ouverture du lieu ?

Le début de l’année 2025 sera marqué par un temps plus administratif d’appels d’offres et d’attributions de marchés. Les travaux devraient ensuite débuter au plus tard au printemps 2025. Ils s’étaleront sur environ 10 mois.

L’ouverture de la Maison de l’autisme et des TND du Limousin est prévue pour le printemps 2026.

Nous souhaitons que ce projet innovant puisse trouver sa place sur le territoire en résonnance avec l’ensemble des structures déjà existantes.

Andréa PERRIER

Directrice du CRA Limousin
Référente du projet de la Maison de l’autisme et des TND

 

Notre projet est innovant. Il n’a pas d’équivalent.

L’objectif est la fluidité pour les usagers, les familles et le travail en complémentarité entre les partenaires dans un lieu unique. La Maison de l’autisme et de TND répond aux besoins des personnes concernées avant, pendant et après le diagnostic.

Les missions remplies par cette maison seront donc très transversales. Elles regrouperont les volets de l’information, du conseil, du diagnostic, de la prise en charge et de la formation.

Nous nous appuyons également sur les connaissances fines de nos partenaires et restons attentifs aux points de vigilance à avoir pour l’accueil du public.

Alcôve © ASB Architecte
Alcôve © ASB Architecte

Nous allons installer à chaque étage des alcôves équipées de rideaux pour que chaque personne, si elle en éprouve le besoin, puisse s’isoler. Le parcours se déploiera avec des courbes aux lignes fluides et aux tons neutres. Les espaces seront aménagés pour tenir compte des aspects sensoriels et des particularités cognitives des personnes accueillies : PVC, plafonds en mousse acoustique, gradateurs de lumière notamment dans les salles d’évaluation utilisées par le CRA.

A l’extérieur des lieux végétalisés sont prévus ainsi qu’un espace pour pique-niquer.


Docteur Éric LEMONNIER

Directeur Médical du CRA Limousin

L’idée première de ce futur établissement est de regrouper dans un même lieu différents acteurs des volets de l’accompagnement et du diagnostic.

L’évolution de la notion de l’autisme et son inscription dans les différentes classifications médicales l’ont conduite aujourd’hui à être reconnue comme un trouble spécifique au sein de l’ensemble des troubles neurodévelopementaux. Cette maison répond donc parfaitement aux évolutions et à l’état actuel des connaissances scientifiques. Elle trouve du sens en respectant la singularité de l’autisme.

Le bâtiment offre également de belles opportunités pour des aménagements possibles et une large ouverture à l’ensemble des acteurs mobilisés par les TND.
Je me félicite de la pleine conscience du CHU de Limoges de nous offrir de telles conditions d’accueil et de travail car celles actuellement du CRA sont plus limitées.

Mme TREUIL – LE GUILLOUX

Représentante de l’Association « Actions pour l’Autisme Asperger »

Cette maison est une excellente initiative. Elle va donner une meilleure visibilité de l’existant sur notre territoire aux familles et personnes concernées. Elle facilitera les échanges et l’entrée en contact pour tous.

Mme MAZABRAUD

Adhérente de l’Association « Actions pour l’Autisme Asperger »

La maison de l’autisme et des TND va renforcer la mutualisation des moyens sur le plan humain et faciliter l’accès à de nombreux services comme la documentation et l’information.

 

Mme LEBRETON

Educatrice & plateforme de ressources PRAETER de l’APAJH Creuse

Nous allons mutualiser notre bureau avec nos collègues de l’APAJH 87. A travers ce lieu nous voulons aussi développer notre partenariat et favoriser la montée en compétences de nos équipes.

 

 

Mme HARDY

Directrice Générale Adjointe des PEP 87

Les PEP seront principalement représentés par la Plateforme de Coordination de d’Orientation (PCO) 0-6 ans et par celle en cours d’ouverture dédiée aux 7-12 ans. La présence de nombreux acteurs en un même lieu va apporter plus de cohérence dans nos interventions respectives. Elle permettra de mieux faire les choses tous ensemble et non pas les uns à côté des autres.

Mme DUPUY

Coordinatrice de la PCO 0-6 PEP 87

Ce regroupement de professionnels présente le double avantage de faciliter les échanges entre intervenants et d’offrir aux familles un lieu commun d’information en lien avec les TND.

 

M. AZANZA Mme BISON 

Chef de service et conseillère emploi du dispositif PLIMOT 87 emploi accompagné

Naturellement notre dispositif d’emploi accompagné avait toute sa place dans ce projet. Nous accompagnons un important public avec trouble du spectre de l’autisme. Nous pourrons mieux faire connaître nos missions et bénéficier d’échanges directs avec nos partenaires.


Les partenaires de la Maison de l’Autisme et des TND

Le CRTLA (Centre Référent des Troubles du Langage et des Apprentissages) du Limousin sera également présent dans la future Maison de l’Autisme et des TND.
D’autres partenaires viendront tenir une permanence, notamment les PEP 19.


Appel à mécénat

Pour soutenir financièrement la création de la future Maison de l’autisme et des TND du Limousin, cliquez sur le lien suivant :

Cliquez ici

Vous souhaitez davantage d’informations sur la Maison de l’autisme et des TND.
Contactez le 06/25/60/35/05 (Andréa Perrier – Référente du projet)


Visite avec les partenaires de la maison de l’autisme et des TND le 12 novembre 2024


Premier anniversaire de la stratégie nationale pour les troubles du neurodéveloppement 2023-2027

Evénements

Communiqué de presse

Le premier anniversaire de la stratégie nationale pour les troubles du neurodéveloppement (TND) : autisme, troubles dys, trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), trouble du développement intellectuel (TDI) est l’occasion de présenter les principales réalisations et avancées obtenues grâce à l’engagement et la mobilisation de tous.

Lancée officiellement le 14 novembre 2023, l’enveloppe totale de la stratégie nationale représente 680M€, le plan « 50 000 solutions » mobilise 1,5 milliards d’euros de ressources nouvelles jusqu’en 2030, dont près de 300 M€ au bénéfice direct des personnes autistes ou concernées par un TND, avec une attention particulière à l’émergence de nouvelles solutions d’accompagnement et de soins, plus modulaires et plus individualisées.

Lire la suite

 

Télécharger le dossier de presse

Télécharger le PDF accessible | Premier anniversaire de la Stratégie nationale 2023-2027 pour les troubles du neurodéveloppement

 

Pour aller plus loin et décryptage

Stratégie TND : quel bilan un an après son lancement?
Source : Handicap.fr

LOI n° 2024-1028 du 15 novembre 2024 visant à améliorer le repérage et l’accompagnement des personnes présentant des troubles du neuro-développement et à favoriser le répit des proches aidants (1)
Source : Legifrance

« L’âge du dépistage est primordial » – Interview Etienne POT (Délégué Interministériel)
Source : Zébres & Cie


APAJH 23

Colloque « Sensorialité : un défi au sein des TND » – 15 novembre 2024 (Sainte-Feyre - 23)

APAJH 23

Evénements

L’APAJH de la Creuse organise le 15 novembre 2024 un colloque sur le thème de la sensorialité dans les Troubles Neurodéveloppementaux (TND). Cet événement, qui se tiendra au Centre médical MGEN Alfred Leune à Sainte-Feyre, s’adresse aux professionnels, familles, accompagnants et à tout personne concernée par les TND et les TSA (troubles du spectre de l’autisme).

Ce colloque, ponctué par les interventions de Claire Degenne, Docteure en Psychologie et Directrice Autisme, TND et Polyhandicap à l’APAJH de la Gironde, abordera les particularités sensorielles des personnes avec TSA/TND. Cet évènement vous permettra de mieux comprendre les particularités sensorielles, d’échanger sur les bonnes pratiques et de découvrir des outils concrets pour améliorer l’accompagnement au quotidien.

Nous vous attendons nombreux pour cette journée d’échanges et de découvertes autour de la sensorialité !

Inscription obligatoire : Pour cela, contactez-nous au 05 55 52 49 88 ou par mail : s.lebreton@apajh23.com.

Date limite d’inscription : 07 novembre 2024

Repas sur place : 15€, réservation nécessaire lors de l’inscription.

Externes : paiement par chèque lors de l’inscription.

 

Toutes les infos sont sur : https://www.apajhcreuse.fr/actualites-et-evenements/


Conférence d'Isabelle HENAULT : l’autisme au féminin [ANNULÉE]

 

Le Centre Ressources Autisme du Limousin et ses partenaires associatifs Actions pour l'Autisme Asperger Limoges et Autisme 87 vous proposent une conférence événement.

 

Intervenante :

Isabelle HENAULT
Dre. Isabelle Hénault est sexologue et psychologue et directrice de la Clinique Autisme et Asperger de Montréal au Canada.

 

Sujet :

L'autisme au féminin

L’objectif de la formation est de mieux comprendre les caractéristiques distinctes liées au profil féminin, le profil des habiletés et des comportements observés chez les filles et les femmes, et enfin d’explorer les diverses ressources actuelles (livres, articles, sites Internet...).
Programme :
- Le profil féminin et le dépistage,
- Caractéristiques (habiletés sociales, gestion des émotions,
théorie de la pensée...),
- Stratégies,
- Historique des autres diagnostics,
- Ressources.

 

Date et Lieu :

Le 04 Novembre 2024  de 9h à 16h30
Auditorium du Crédit Agricole Centre Ouest
20 rue Pierre Boulez
87000 Limoges

 

Inscription :


Formation ouverte à tous.
Tarif unique : 25€

Toutes les informations pour vous inscrire sont disponibles sur : https://www.actionsautismeasperger.org/_files/ugd/b9a4e6_3012f63c433948c7beffa471aead24da.pdf

 


Webinaire iMIND #14 - Les comportements-défis : entre compétences professionnelles et familiales

iMIND Lyon

Ce webinaire vous propose de discuter de stratégies pratiques permettant aux familles d’être pleinement impliquées dans la prévention et la gestion des comportements défis de leur proche, mais aussi des moyens de favoriser une approche intégrée et collaborative, où les professionnels de l’accompagnement au quotidien et en santé soutiennent de manière constructive les compétences des familles, mais aussi leurs désarrois et interrogations, afin de co-porter les processus décisionnels et les interventions.

Nous explorerons comment cette mutualisation des compétences peut enrichir les expertises professionnelles et familiales pour améliorer la qualité de vie des personnes concernées, et de leur entourage familial et professionnel.

Rejoignez-nous pour ce webinaire qui promet d’être passionnant afin de construire des réponses plus participatives et efficaces pour soutenir les personnes concernées.

Intervenantes :
Sophie Biette, parent, administratrice Unapei et présidente de l’Adapei Loire-Atlantique
Caroline Demily, psychiatre, cheffe du pôle HU-ADIS de l’hôpital du Vinatier et coordinatrice du Centre d’Excellence autisme et TND iMIND

Grilles d’évaluation dont la Pre Demily parle dans son intervention :
GEDDI : https://www.cra-rhone-alpes.org/IMG/p...
FAST : https://aba-sd.info/documents/fast_ou...

 

 


Interview de Laëtitia CARTON réalisatrice du film « J’avancerai vers toi avec les yeux d’un sourd »

Rencontre avec Laëtitia CARTON

 

  • Temps de lecture estimé : 8 min

Dans le cadre de la journée mondiale de l'autisme, le mardi 2 avril à Limoges aura lieu au cinéma "Le Lido"  la projection du film documentaire « J’avancerai vers toi avec les yeux d’un sourd » en présence de sa réalisatrice Laetitia CARTON.
La séance prévue à 18h30 sera suivie d'un échange avec le public.

Pour participer à cet événement gratuit, il est indispensable de s'inscrire (jusqu'au mercredi 27 mars) : https://my.weezevent.com/javancerai-vers-toi-avec-les-yeux-dun-sourd-laetitia-carton

 

Avant cette diffusion, le CRA Limousin a voulu recueillir la parole de Laetitia CARTON. En tant que réalisatrice et en tant que personne autiste, nous avons voulu connaître son regard sur l'univers de la création. Nous la remercions très chaleureusement pour sa disponibilité et pour le temps qu'elle a bien voulu nous accorder.

 

 

Votre documentaire présenté le 2 avril s'intéresse à l'univers des sourds. Quels sont les liens entre ce monde et celui des autistes ?

Le tournage de ce film a été long. Il a duré dix ans de 2006 à 2016.
Je me suis intéressée au monde des sourds pour montrer qu'il ne s'agit pas d'un handicap en référence à une norme. Les sourds disposent d'une culture à part entière avec une langue qui leur est propre. Cette langue des signes m'a d'ailleurs toujours attirée. Je la trouve magique. Elle m'a permis de découvrir la richesse de leur culture. Comme pour l'autisme, nous sommes ici confrontés à un handicap, même si je déteste ce mot "handicap", que l'on nomme invisible. J'ai voulu faire ce film pour les entendants afin qu'ils réinterrogent leurs postures et qu'ils reconnaissent la surdité comme une véritable identité.

D'un point de vue plus personnel, j'ai également débuté ce film sans que mon fils et moi ayons été diagnostiqués autistes. Lorsque nous avons débuté les projections publiques j'ai été interpellée car il y avait toujours dans la salle des spectateurs qui me disaient :

"Dans ce que vous montrez vous pouvez remplacer le mot sourd par autiste... les problématiques sont les mêmes dans le combat et dans la lutte pour une meilleure reconnaissance de ce que nous sommes. On vit les mêmes choses".

Je n'ai pas eu ces retours avec les aveugles par exemple ou avec d'autres publics.
Puis en 2019 mon fils a été diagnostiqué autiste Asperger et c'est une bonne partie de la famille qui a suivi : moi, suspicion pour ma mère et d'autres membres de ma famille.

C'est peut-être pour toutes ces raisons que je me suis toujours intéressée à la différence, un mot qui me paraît plus représentatif et plus juste que celui de handicap. Il faut savoir que l'une des origines du mot handicap et l'une des images qui lui est associé est celle des poids portés par les chevaux lors de certaines courses. On dit qu'ils ont un handicap, un poids qui les gêne.

Enfin ce documentaire et la plongée dans ce monde des sourds c'est aussi une lettre à un ami, Vincent, qui m'était cher et qui malheureusement est décédé.

 

Vous parlez beaucoup de la notion de handicap et du rapport à la normalité, qu'entendez-vous par là ?

Je veux dire que c'est la situation qui créé un handicap et provoque l'inaccessibilité.
C'est d'ailleurs le message principal de mon film qui défend la volonté de mettre en place une société vraiment adaptée à tous.
En effet, pourquoi faut-il que le monde soit uniforme ? Ne sommes nous pas tous différents ? Cela fait partie de la richesse humaine. Nous sommes multiples.
Chez les autistes cette diversité existe. Pourtant nous devons constamment nous plier à beaucoup de normes. Nous devons constamment nous adapter ce qui nous coûte beaucoup de fatigue et d'énergie.

Vous êtes une réalisatrice autiste, à travers cette double identité quel regard portez vous sur la culture ?

L’art et la culture sont mes grands intérêts spécifiques. C'est fondamental pour toutes les sociétés et donne du sens à ma vie. Si je ne suis pas dans la création je meurs. Depuis toujours je ne me sens vivante et à ma place qu’à travers la création. Petite déjà j’étais constamment dans des activités manuelles: découpage, collage… J’ai ensuite été à l’école des Beaux Arts et là j’ai découvert le cinéma documentaire.
Avec le temps j’ai aussi identifié un autre de mes intérêts spécifiques, plus subtil, c’est l’intensité de la connexion à l’autre, par la transmission, et la communication. Ces deux intérêts, la création et la communication, se sont rejoints et ont pris forme à travers le désir de vouloir transmettre des idées et des messages par le cinéma. Et je préfère le documentaire à la fiction car cette manière de faire des films, avec le réel, dans la vraie vie, me permet d’aller à la rencontre du monde et de développer de nombreuses connexions avec un cadre trés précis dont je connais les règles.

Je pense qu’à travers mes films certaines personnes autistes arrivent à percevoir que je suis moi même autiste. Les éléments de mes créations, comme le son de ma voix, assez monocorde, ma sensibilité, la densité des idées que je transmets, la construction plutôt en arborescence que linéaire, ou bien le regard que je porte en sont les témoins.
Mes films me permettent de mettre en forme ma manière d'être, ma différence.
Enfant, j'ai le souvenir que tout était un choc pour moi. Je me suis construite à travers cette histoire qui se reflète dans mes productions.

Tout au long de mon parcours, j’ai eu de la chance, mes parents m’ont toujours laissé faire ce que je voulais, sans pression. J’ai pu faire des études en lien avec mes intérêts spécifiques, des études d’art. J’ai réussi à me plier au moule de la société, j’ai eu cette chance de le pouvoir, de savoir m’adapter, me sur-adapter, en permanence, mais pour cela, j’ai dû, en permanence, mettre un couvercle sur mes sensations, jusqu’à mon diagnostic à l’âge de 45 ans. Je sais que j’ai de la chance. De pouvoir vivre de mes intérêts spécifiques. Être artiste, cinéaste, reste une situation précaire, mais je ne pourrais pas faire autre chose, j’en suis incapable et heureusement j’ai l’intermittence du spectacle qui me permet de pouvoir continuer à faire ce métier.

 

Vous évoquez les connexions possibles à travers vos réalisations et l'importance de communiquer. Ce sont aussi des éléments très présents dans nos sociétés...

Comme tous les outils c'est la manière dont on utilise ces nouveaux moyens de communication qui est importante. Personnellement, les réseaux viennent épancher ma soif.
Internet, je l'attendais depuis toute petite pour pouvoir répondre à mes nombreuses questions. Les connexions offertes me nourrissent et me permettent de partager des informations à distance qui me fatiguent moins.
Ma vie sans internet serait plus dure même si je vois bien quelles sont les dérives possibles. L'idée de la vitesse exponentielle est à repenser. Il faudrait réintroduire un peu plus de lenteur.
Malgré ces aspects, je pense que ces nouvelles formes de communication sont des vecteurs importants de diffusion de la culture. Ils offrent la possibilité d'un immense partage de connaissances et de savoirs à distance. C'est du pain béni pour les autistes.

 

 

Pouvez-vous nous parler de vos projets actuels et de votre travail en cours ?

Mon nouveau film s’intéresse toujours à la transmission, et cette fois à  la communication non violente (CNV). C’est un outil précieux pour tous et notamment pour les personnes TSA.
Cette manière de vivre ses relations  permet notamment de vérifier quels sont les besoins et les émotions échangés, afin d’assurer une sécurité relationnelle. C’est aussi un outil qui m’aide personnellement dans ma vie quotidienne. J’ai cherché longtemps comment incarner la CNV dans un film et j’ai fait la rencontre d’une enseignante extra ordinaire, avec une classe de toute petite section en maternelle, qui incarne complètement le processus. C’est un film qui parlera donc encore et encore de transmission, mais aussi de l’enfance et de l’amour.

Participez au financement de ce projet : https://don.declic-cnveducation.org/les-projets-a-soutenir/detail/la-petite-classe

 

En guise de conclusion et en lien avec la journée mondiale de l'autisme, souhaitez vous dire une dernière chose ?

J’ai été marquée par les soirées entre sourds, au début où je ne connaissais pas leur langue, où seule entendante, c’était moi l’ "handicapée" au milieu d’eux. On expérimente ce que c’est de vivre dans un monde dont on a pas les codes, les règles, où l’on ne peut pas, où l'on est empêché. Auquel on n’a pas accès. Ça m’a permis de comprendre très tôt, que ce sont les situations qui créent le handicap, pas qui l’on est. De même comment réagirait une personne neurotypique si elle se trouvait seule autour de cinquante personnes TSA ? Comment s’adapterait-elle ?
L’autisme est une manière d’être et d’appréhender le monde différemment.
Cette déconstruction des idées reçues est lente mais je trouve qu’elle avance. Les mentalités petit à petit changent. Pour pleins de raisons, je n’aurai pas aimé vivre cinquante ans en arrière.
A présent par exemple, lorsque je vais au supermarché et lorsque je demande que l’on baisse la lumière ou la musique, je vois que les gens comprennent mieux mes demandes. Je n’ai pas besoin de reformuler ou d’expliquer systématiquement les choses. Il y a quelques années les réactions de mes interlocuteurs n’étaient pas les mêmes. Ça progresse. 

 

En savoir plus

Cette soirée au cinéma "Le Lido" s'inscrit dans la thématique de l'autisme et de la culture retenue sur notre territoire pour la journée mondiale de l'autisme 2024.
Toutes les informations et le programme complet des festivités sont sur notre site : https://www.cralimousin.com/journees-mondiales-de-lautisme/

 

 

 

Suivez également Laëtitia CARTON à travers le podcast "HYPER RURAL" : https://podcast.ausha.co/hyperrural
Un podcast de Laetitia Carton, à la rencontre de ses voisins et voisines du Plateau de Millevaches, dans l'hyper-ruralité française, 7 habitants au Km2, à 750 m d'altitude.
A travers cette collecte de récits de vies se dresse le portrait en creux de la Montagne Limousine, terre d'accueil depuis toujours.

 

Pour aller plus loin sur le sujet de la culture, accédez également à un dossier documentaire avec de nombreuses ressources en ligne :
https://cra-limousin.centredoc.fr/index.php?lvl=cmspage&pageid=6&id_rubrique=1

 

Interview et dossier réalisé par Nicolas Roumiguières
Documentaliste au CRA Limousin


 


Journée mondiale de l'autisme 2024

Le CRA Limousin et l’ensemble de ses partenaires vous proposent un programme consacré à la thématique de “l’Autisme et de la Culture” dans le cadre de la journée mondiale de l’autisme 2024 qui aura lieu le mardi 2 avril.

Des manifestations sont prévues sur l’ensemble de notre territoire (Creuse, Corrèze, Haute-Vienne).

Retrouvez le programme et les lieux des expositions en cliquant ici

Toutes les informations sur la conférence “Autisme et accès à la culture” en cliquant ici

Les projections cinéma prévues en cliquant ici

Les animations complémentaires proposées par nos partenaires en cliquant ici

La participation aux Foulées Roses organisées par le journal “Le Populaire” en cliquant ici

 


Aller au contenu principal